Par Alexandra Gaboriau, consultante chez CHEFCAB
« Reconquérir le mois de juin » en instaurant un stage de deux semaines pour les élèves de seconde générale et technologique : telle était la promesse de Gabriel Attal, alors ministre de l’Education nationale sur le plateau de TF1, il y a près d’un an jour pour jour.
Ce stage, obligatoire pour les quelques 560 000 lycéens qui étaient concernés cette année, s’est déroulé durant la deuxième quinzaine de juin.
« « Stages kebab » « stages photocopieuses » la qualité des stages proposés a aussi été pointée du doigt. »
Malgré les vives inquiétudes exprimées par les parents, enseignants et chefs d’établissement, dues notamment au rappel tardif du ministère auprès des entreprises, l’enquête annuelle du SNPDEN révèle des résultats encourageants : 77% des élèves de seconde générale et technologique ont trouvé un stage en juin dernier. Cependant, ces chiffres doivent être nuancés par le manque de suivi dans certains établissements. Parmi les répondants à l’enquête, 52% des établissements indiquent n’avoir rien prévu en termes « d’exploitation du stage » alors que les élèves sont censés « restituer » le fruit de leur expérience devant leur classe de première. « Stages kebab » « stages photocopieuses » la qualité des stages proposés a aussi été pointée du doigt. Sans réelle concertation préalable et mise en place dans l’urgence, cette réforme a essuyé de nombreuses critiques notamment de la part des organisations syndicales qui révélaient que 25% des élèves de Seconde avaient trouvé un stage à seulement trois semaines de la date butoir.
« Cette dernière option a été vivement critiquée par les syndicats de l’éducation, la qualifiant de « vaste supercherie » et y voyant une tentative déguisée de généraliser le SNU au sein de l’éducation nationale. »
Pour pallier la difficulté de certains élèves de Seconde à trouver un stage, il leur était possible d’effectuer un séjour linguistique à l’étranger ou de participer au Service National Universel (SNU). Cette dernière option a vivement été critiquée par les syndicats de l’éducation, la qualifiant de « vaste supercherie » et y voyant une tentative déguisée de généraliser le SNU au sein de l’éducation nationale.
Ce dispositif, perçu comme opaque et à connotation militaire par le grand public, a par ailleurs fait l’objet d’un rapport au vitriol publié par la Cour des comptes le 13 septembre dernier. Le coût de sa généralisation prévue en 2026 est largement sous-estimé, oscillant entre 3,5 et 5 milliards d’euros par an, sans compter les coûts d’investissement à venir dans les centres d’hébergement, les surcoûts liés au changement d’échelle et les coûts portés par les autres financeurs publics.
« (…) la mise en place de ces stages pour les élèves de seconde générale aurait réduit les opportunités pour les élèves en voie professionnelle. »
Les lycéens professionnels n’ont pas été épargnés par cette réforme. 38% des chefs d’établissement, interrogés dans le cadre de l’enquête menée par le SNPDEN, considèrent que la mise en place de ces stages pour les élèves de seconde générale aurait réduit les opportunités pour les élèves en voie professionnelle.
Une situation qui pourrait avoir des conséquences plus graves : l’absence de stage pour un élève en formation professionnelle peut compromettre sa certification tandis qu’un élève de seconde générale peut être accueilli dans son lycée pour « bénéficier de solutions en ligne de découverte des environnements professionnels et y effectuer des recherches documentaires pour préciser ou parfaire son projet d’orientation » selon une circulaire du ministère. Cédric Chevalier, Sénateur de la Marne, interrogeait en mars dernier Nicole Belloubet sur la faisabilité de ce cas de figure, notamment en période d’examens (baccalauréat) où le personnel enseignant est fortement mobilisé.
« (…) la généralisation du stage de seconde obligatoire devra certainement faire l’objet d’une réévaluation. »
Alors que « l’éducation restera la priorité du gouvernement » selon les mots de Michel Barnier lors de la passation de pouvoirs avec Gabriel Attal, la généralisation du stage de seconde obligatoire devra certainement faire l’objet d’une réévaluation. Nulle doute que le Premier Ministre, qui envisageait d’introduire l’apprentissage « dès 14 ans », lors des primaires de la droite en 2021, y sera sensible.