Par Alexandra Gaboriau, consultante chez CHEFCAB
En parallèle de la suppression de 4 000 postes d’enseignants dans le premier degré, la rentrée scolaire 2024 met un coup de projecteur sur la situation préoccupante des Accompagnants d’Élèves en Situation de Handicap (AESH), alors que 2000 postes supplémentaires sont attendus pour 2025 afin de pallier le manque de professionnels sur le terrain. Malgré les progrès impulsés par la loi de 2005 et les efforts d’inclusion intensifiés depuis 2017, le concept d’école inclusive prend forme, mais des obstacles subsistent pour assurer à chaque élève l’égalité des chances un enseignement adapté et un cadre bienveillant.
Ces agents non titulaires de l’Éducation nationale (contractuels), jouent pourtant un rôle clé dans l’accompagnement des élèves en situation de handicap. Ils facilitent leur inclusion dans les classes ordinaires en assurant une aide adaptée tant sur le plan pédagogique que personnel. Sans leur accompagnement, de nombreux élèves auraient du mal à suivre une scolarité classique. Et pourtant les AESH demeurent souvent en marge des débats. Leur situation professionnelle est caractérisée par des contrats généralement à durée déterminée, des temps partiels imposés, et des salaires parfois inférieurs au Smic. Même si des avancées ont eu lieu via la loi du 16 décembre 2022, comme l’accès au CDI au bout de trois ans et des augmentations salariales, ces mesures n’ont pas suffi à répondre aux préoccupations des syndicats, qui dénoncent une précarité enlisante.« La diversité des handicaps pris en charge — troubles cognitifs, handicaps sensoriels et moteurs — exige des compétences spécifiques pour lesquelles la formation demeure insuffisante, selon plusieurs professionnels. »
La diversité des handicaps pris en charge — troubles cognitifs, handicaps sensoriels et moteurs — exige des compétences spécifiques pour lesquelles la formation demeure insuffisante, selon plusieurs professionnels. En réponse à l’augmentation du nombre d’élèves en situation de handicap, désormais estimé à 45 000, l’Éducation nationale prévoit la création de 2 000 postes supplémentaires en 2025. Un chiffre bien en deçà des besoins réels, selon les équipes pédagogiques sur le terrain.
« Cependant, de nombreuses collectivités, comme celle de Podensac en Gironde, se retrouvent encore à recruter elles-mêmes des AESH pour combler les manques, faute d’un encadrement clair. »
Dans cette optique, la loi de 2024, qui prévoit que l’État prenne en charge l’accompagnement des élèves en situation de handicap durant les temps méridiens, avait pour ambition de renforcer l’organisation de l’école inclusive. Cependant, de nombreuses collectivités, comme celle de Podensac en Gironde, se retrouvent encore à recruter elles-mêmes des AESH pour combler les manques, faute d’un encadrement clair. La ministre elle-même reconnaissait lors de son audition au Sénat le 22 octobre dernier que l’application de cette loi reste inégale à travers le territoire – une déclaration interrogeant sur la capacité de l’Etat à gérer le recrutement de 2 000 AESH supplémentaires prévus par le projet de loi de finances pour 2025, alors que le métier souffre d’un déficit d’attractivité important.
Dans ce contexte, rappelons que des propositions avaient déjà été formulées en 2023 par l’association France Urbaine à Fadila Khattabi, alors ministre déléguée chargée des Personnes handicapées. Parmi elles, la réalisation d’un diagnostic précis des besoins humains, financiers et matériels pour chaque collectivité, ainsi qu’une meilleure implication des collectivités dans la planification de l’accompagnement des élèves. Une solution résiderait notamment dans la mise en relation des AESH avec les instances de coordinations infradépartementales créées par la loi d’avril 2024 sur le bien vieillir (en attente des décrets d’application). Ces structures permettent de rassembler différents acteurs, tels que les Agences Régionales de Santé (ARS) et les Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH), pour planifier et adapter l’accompagnement des élèves en fonction des besoins locaux et des structures suffisantes.
« Un renforcement de la coordination entre AESH, enseignants et services périscolaires, ainsi qu’une meilleure intégration de ces personnels dans les équipes pédagogiques pourraient également représenter des leviers à considérer pour améliorer leur statut. »
Aussi, la DGESCO, en coordination avec les recteurs d’académie, pourrait impulser des mesures telles que la revalorisation salariale, la généralisation des contrats à durée indéterminée, ou encore l’instauration d’une formation certifiante adaptée à la diversité des handicaps. Un renforcement de la coordination entre AESH, enseignants et services périscolaires, ainsi qu’une meilleure intégration de ces personnels dans les équipes pédagogiques pourraient également représenter des leviers à considérer pour améliorer leur statut.